Compromis de vente vs promesse unilatérale

Vous êtes vendeur ou acquéreur et venez de signer une offre d'achat pour un bien immobilier ? Si la vente est en théorie formée dès la rencontre des consentements, la pratique requiert que plusieurs étapes soient franchies avant le transfert du droit de propriété, la première étant de rassembler et transférer les pièces indispensables à la constitution de dossier de vente, ce que nous appelons l'entremise aux notaires. Deux types de contrats, appelés actes sous signature privée et précédant l'acte authentique, peuvent ensuite être rédigés par ceux-ci : le compromis de vente ou la promesse unilatérale de vente. Cependant, il convient de s'assurer, avant de les signer et pour ne pas compromettre la vente, qu'aucun pacte de préférence n'ait été consenti par le vendeur à un tiers. Nous allons donc revenir ici sur la définition et sur le régime juridique de ces trois contrats préparatoires à la vente finale.

1 - Le pacte de préférence :

  • définition : contrat à part entière, il est régi par l'article 1123 de notre Code civil qui le définit comme "le contrat par lequel une partie s'engage à proposer prioritairement à son bénéficiaire de traiter avec lui pour le cas où elle déciderait de contracter". L'engagement n'est donc ici qu'unilatéral puisqu'il ne pèse que sur l'éventuel futur vendeur mais le bénéficiaire doit toutefois consentir au pacte. Attention ! Il ne s'agit pas ici de s'engager à vendre ou à acheter mais, au moment où la décision est prise de vendre le bien, de proposer en priorité le bien au bénéficiaire du pacte. Pour que la vente puisse se réaliser, le promettant doit décider de vendre son bien et le bénéficiaire doit décider de l'acquérir à ce moment-là. En revanche, dès que le propriétaire du bien décide de le vendre, il doit le proposer en priorité au bénéficiaire et s'abstenir de le proposer à une autre personne le temps de la validité du pacte. Le prix de vente peut n'être défini qu'au moment de la vente et n'a pas besoin d'être prévu à l'occasion du pacte. Si le vendeur refuse le prix proposé par le bénéficiaire, il est libéré du pacte mais ne peut pas proposer le bien à d'autres personnes à des conditions plus avantageuses.
  • durée : le pacte peut être à durée déterminée ou non. Si le contrat ne prévoit pas de date de caducité, il court tant que le promettant n'a pas formulé d'offre au bénéficiaire (a priori le contrat devrait s'éteindre sous 20 ans mais aucune décision judiciaire n'a pour le moment confirmé ce délai). Si le droit commun des contrats est applicable en la matière, un pacte à durée illimitée devrait pouvoir être résilié unilatéralement en respectant un préavis mais encore une fois, aucune décision de justice ne permet de confirmer cela.
  • sanction : si le promettant vend le bien à un tiers sans avoir fait d'offre au bénéficiaire du pacte, la sanction dépend de la bonne ou mauvaise foi du tiers. En effet, si l'acquéreur effectif n'avait pas connaissance du pacte de préférence, le bénéficiaire du pacte insatisfait ne peut que demander des dommages et intérêts au promettant. En revanche, le bénéficiaire insatisfait peut demander à se substituer au tiers acquéreur ou à annuler la vente (en plus de dommages et intérêts) s'il peut démontrer que l'acquéreur avait connaissance du pacte et qu'il savait que le bénéficiaire souhaitait acheter le bien.
  • action interrogatoire : si un tiers apprend l'existence d'un pacte de préférence entre le propriétaire du bien qui l'intéresse et une autre personne, la loi prévoit qu'il peut demander par écrit au bénéficiaire si ce dernier souhaite s'en prévaloir. Si le bénéficiaire ne répond pas dans le délai imparti (qui doit être raisonnable), il ne pourra plus agir en substitution du tiers ou en nullité de la vente.

2 - Le compromis de vente :

  • définition : aussi appelé promesse synallagmatique de vente, ce contrat préparatoire crée des obligations d'intensité égale entre le vendeur et l'acquéreur ce qui amène à considérer que le compromis de vente vaut vente, dès que les parties consentent à la chose et à son prix. Toutefois, la vente définitive pouvant reposer sur la réalisation de certains événements (obtention d'un prêt, autorisations d'urbanisme, etc.), le contrat peut prévoir de donner le temps aux parties d'accomplir certaines formalités. Ainsi, la nature de la promesse synallagmatique peut varier selon son contenu.
  • typologie : si la promesse manifeste un consentement définitif des deux parties mais fait dépendre la vente de la réalisation d'un événement futur et incertain, on parle de vente conditionnelle. Le contrat prévoit alors des conditions suspensives ou résolutoires et reste une promesse tant qu'elles sont pendantes. La vente est parfaite lorsque les conditions suspensives se réalisent, elle est caduque lorsqu'elles ne se réalisent pas dans les délais prévus (les parties doivent tout mettre en oeuvre pour leur réalisation). Si la promesse est soumise à la réalisation d'un événement futur mais cette fois certain, on parle de vente à terme (fréquente dans le cadre d'acquisition de biens à construire). Il existe d'autres types de compromis mais ces deux sont les principaux rencontrés en matière de vente immobilière.
  • sanction : dans les cas ci-dessus, la signature de l'acte authentique devant le notaire n'a pas pour but de retarder le transfert de propriété. Les parties conviennent d'aménagements mais s'engagent à tout mettre en oeuvre pour aboutir au transfert du droit de propriété. Ainsi, on considère que le compromis vaut vente et il peut donc faire l'objet d'une exécution forcée, d'une résolution ou de dommages et intérêts si une des parties ne respecte pas ses engagements (par exemple, lorsque l'acquéreur lève sa condition suspensive d'obtention d'un prêt mais se désiste avant la signature de l'acte).

3 - La promesse unilatérale de vente :

  • définition : c'est le type de contrat que les notaires vous proposeront le plus souvent. Ici, le vendeur s'engage à vendre mais l'acquéreur n'a qu'une option d'achat qu'il doit lever dans un délai déterminé pour devenir propriétaire. Lorsque l'acquéreur lève l'option, la vente devient parfaite et le vendeur peut être contraint de vendre.
  • indemnité d'immobilisation : pour compenser le déséquilibre des engagements, la loi permet à l'acquéreur de verser une partie du prix au promettant (en général 5% du prix qui seront conservés par le notaire tant que la promesse court). La somme versée est déduite du prix total si l'acquéreur lève l'option d'achat mais revient au promettant si l'acquéreur décide de ne plus acheter pour un motif autre que la non-réalisation d'une condition suspensive.
  • sanction : les cas visés ici sont principalement la rétractation du vendeur et la vente du bien à une personne autre que le bénéficiaire de la promesse (le vendeur ne peut pas contraindre le bénéficiaire à acheter). Le vendeur qui s'est obligé à vendre et qui se rétracte avant l'expiration du délai de levée d'option par l'acquéreur s'expose à une action en réparation (dommages et intérêts) ou à une exécution forcée de la vente. Le vendeur engagé qui vend le bien à une autre personne que le bénéficiaire peut se voir demander des dommages et intérêts. En revanche, si cette autre personne avait connaissance de l'existence de la promesse (à démontrer), le bénéficiaire peut agir en nullité de la vente .